Comment mesurer, comprendre et réguler la charge de travail ?

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Dans un contexte où les entreprises doivent en permanence s'adapter, se transformer ou innover, la charge de travail des salariés est devenue un sujet à la fois crucial et complexe. De plus en plus difficile à comprendre, à percevoir et à matérialiser.

Le point avec Sophie Changarnier, psychologue du travail pour le cabinet franco-québécois Empreinte Humaine, spécialisé dans le champ de la qualité de vie au travail et de la prévention des risques psychosociaux.


Sophie Changarnier, psychologue du travail pour le Cabinet Empreinte Humaine

  • Qu’est-ce qu’on entend par charge de travail ?

    Sophie Changarnier : La question de la charge de travail est un sujet important dans les organisations et il y a différentes manières de l’aborder. On a souvent l’impression que c’est juste une question de quantité, mais c’est plus complexe que cela.

    Les travaux de l'ANACT (Agence Nationale pour l’Amélioration des Conditions de Travail) ont permis de définir trois grandes composantes :

    • la charge de travail prescrite,
    • la charge réelle
    • la charge vécue.

    La charge prescrite, c’est le nombre de projets sur lesquels je vais travailler, sur prescription de la Direction. Mais la charge de travail, c'est aussi la réalité du quotidien : j’ai un nombre de dossiers à traiter, mais je suis constamment interrompu à cause de réunions ou autres aléas, ce qui fait que je n'arrive pas à me concentrer sur mes dossiers. C’est la charge réelle. Et puis, la charge de travail, c'est aussi une notion de perception, ce qu’on appelle la charge vécue. Il s’agit de l’effet sur l’individu de l’équilibre entre sa charge prescrite et sa charge réelle.

    L'idée est donc de ne pas s'arrêter à la question de la prescription, qui est finalement celle majoritairement adoptée dans nos organisations. Il faut aller sur le terrain pour voir la réalité.


    Est-ce que chacun peut agir à son niveau ?

    SG : Il y a un préjugé qui nous fait dire que seule la Direction peut agir sur cette question de la charge de travail, alors que c'est souvent elle qui va définir la charge prescrite. Le management et les collectifs de travail ont aussi un rôle très important pour pouvoir se réguler par rapport à cette thématique. Et enfin, il y a moi par rapport à ma charge de travail : comment je gère mon agenda, comment je priorise mes activités. Il est donc intéressant de travailler sur cette notion de coresponsabilité avec, pour chacun, sa marge de manœuvre et son niveau d'influence.


    Existe-t-il un outil magique pour réguler la charge de travail ?

    SG : Malheureusement non ! Mais c'est plutôt un processus par étapes. Pour réguler la charge de travail, il faut déjà bien comprendre de quoi elle se compose avant de pouvoir l’évaluer. Il y a aussi une réflexion autour de la charge réelle : qu'est-ce qui nous prend le plus d'énergie ? Qu'est-ce qui fait qu’à la fin de la journée, on a l'impression d'être surchargé ? Et à l'inverse, qu'est-ce qui nous donne de l'énergie ? Pour ce faire, il est intéressant d’agir au niveau du collectif.

     

    Vous qui êtes allée sur le terrain à la rencontre des dirigeants, avez-vous de bonnes pratiques à nous donner ?

    SG : La première bonne pratique est de se saisir du sujet avec humilité. C’est un sujet complexe et on sait qu’on ne pourra pas agir sur tout. Mais l'idée, c'est de pouvoir commencer : la stratégie des petits pas en quelque sorte.

    Certaines organisations peuvent avoir des process administratifs, notamment de reporting, extrêmement complexes et énergivores. Elles ont mis en place des simplifications du système en identifiant les processus qui leur prenaient le plus d'énergie et de temps. D’autres travaillent sur la thématique des réunions. Il existe des organisations qui développent des règles collectives dans la manière de se réunir et de travailler ensemble pour avoir le moins de réunions possible. Ou au moins, pour que les réunions se fassent uniquement avec les personnes utiles pour avancer sur le sujet, avec des règles de fonctionnement établies collectivement.


    Faut-il aussi agir sur les mentalités ?

    SG : On a besoin d’être sensibilisé sur ces sujets, de comprendre ce qu’on va mettre à l'intérieur. On se heurte aussi à des représentations sociales. Prenons par exemple la représentation d’un bon cadre, d’un bon manager ou d’un bon opérationnel qui envoie des mails tard le soir pour prouver qu’il est toujours actif. Car dans certaines organisations, montrer qu'on est débordé, c'est plutôt valorisant.

    Dans son ensemble, la société française a aussi, une valeur travail très forte. Un exemple : quand on se présente à quelqu’un, on dit d’abord bonjour et la question qui vient après est souvent : qu'est-ce que vous faites comme activité professionnelle ? Tout en préservant la valeur travail, il faut être plus attentif aux équipes de vie, au champ de la santé. Au travail de manière plus générale.

     

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