Que recouvre concrètement la rémunération dans une entreprise ?
Frédéric Bonneton : La rémunération, c’est le fondement du contrat de travail. À partir du moment où vous signez, vous échangez votre temps et vos compétences contre un salaire. Mais il faut aussi intégrer les rémunérations variables, comme l’intéressement et la participation, sans oublier la protection sociale : mutuelle, prévoyance, retraite.
Au final, la rémunération est à la fois le premier poste de charges fixes de la plupart des entreprises, le premier lien entre le collaborateur et l'entreprise, et un élément primordial d'attractivité, de fidélisation et de performance.
En quoi consiste une bonne politique de rémunération dans une entreprise ?
FB : Il faut d’abord définir ce qu’on peut appeler une bonne orthodoxie de rémunération en répondant à la question : « Dans votre entreprise, que rémunère le salaire fixe ? ». Vous allez ensuite définir les éléments de rémunération variable individuelle, en dehors de la rémunération variable d'équipe ou d'entreprise. Au final, une bonne politique de rémunération est une politique claire pour les collaborateurs comme pour les managers.
Aligner les rémunérations sur les stratégies de l'entreprise, est-ce que cela a un sens ?
FB : Dans mon cabinet, cela fait 27 ans que l’on se bat pour aligner les rémunérations sur les stratégies d'entreprise, alors que la rémunération correspond en général à la fonction. Il faudrait plutôt se dire : « je regarde quelle est ma contribution à la stratégie en termes de compétences et de performance ». Ce qui amène à des politiques de rémunération très différentes. L'inconvénient ? En créant une différence, il devient difficile de se comparer au marché. Mais cette altérité peut aussi attirer : « Venez chez nous, nous avons une stratégie précise et nous vous rémunérons en fonction de votre contribution à cette stratégie ». Ce message peut devenir clé en tant qu’outil de management.
Et comment faire pour s’aligner ?
FB : Au lieu de partir des objectifs qui sont corrélés à la fonction, il faut partir des objectifs qui sont corrélés à la stratégie. Prenons un exemple : la fonction d’un commercial est de faire du chiffre d'affaires. Si ma stratégie demain, c'est d'aller vers d'autres types de clients, je vais avoir du mal à le convaincre, sauf à rajouter des « surcouches » de rémunération. Mais si ma stratégie, c'est d'aller vers de nouveaux clients ou de nouvelles offres, les équipes commerciales vont naturellement suivre. Concernant la stratégie des salaires, elle devra être orientée sur les compétences utiles au projet d'entreprise.
Est-ce les salariés montrent des craintes de voir leur rémunération changer ?
FB : Quand on va voir des collaborateurs en leur disant que le système de rémunération va changer, il y a toujours cette crainte. Pour la gommer, il faut d’abord écouter les collaborateurs via des groupes d'expression. Il faut aussi intégrer dans nos propositions les croyances collectives qui existent au sein de l’entreprise : « Si tu ne dis rien, tu ne seras pas augmenté », « l’entreprise ne prévoit des augmentations qu’une fois tous les trois ans »…
Quelles sont les clés du succès d'une rémunération liée à la performance ?
FB : Il y a trois clés :
- Il faut que ce soit lisible.
- En tant collaborateur, il faut que je puisse avoir un impact dessus.
- Il faut que la rémunération soit à la hauteur de l'effort que vous allez me demander.
L'intéressement aux performances peut-il concerner des entreprises de toutes tailles et tous secteurs d'activité ?
FB : L’intéressement vient de la loi ; il peut donc s’appliquer partout. S’il ne s'applique pas beaucoup aux PME, c'est sans doute par manque de connaissance ou de compréhension du sujet. C’est dommage parce que l’intéressement est d’abord un outil de management : on peut l’associer à des objectifs de performance par équipes. C'est un véritable un outil de rémunération qui en plus, dans le cadre de la loi, permet d'aller jusqu'à 20 % de la masse des salaires sans charges sociales. L’intéressement peut donc concerner toutes les entreprises et tous les secteurs d’activité. Mieux, il DOIT.