Indemnités de fin de carrière : comment optimiser la charge financière au sein des TPE / PME ?

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Dans le paysage social de l’entreprise, certaines obligations passent souvent sous les radars. Parmi elles, les indemnités de fin de carrière (IFC) font figure de grandes oubliées. Et une provision comptable ne suffit pas à anticiper l’impact brutal qu’un départ peut avoir sur la trésorerie d’une entreprise. Pire, ce type d’évènement peut plomber une opération de cession ou de transmission.

Il ne s’agit pourtant pas d’un sujet réservé aux grands groupes. Dans les TPE-PME, le choc peut être encore plus brutal, surtout lorsque plusieurs départs interviennent dans un laps de temps court.

La bonne nouvelle : des outils existent pour anticiper ces coûts, et même les optimiser fiscalement. Encore faut-il les connaître… et les mettre en œuvre à temps.

Comprendre les indemnités de fin de carrière : ce que dit la loi (et la convention collective applicable)

  • Lorsqu’un salarié part volontairement à la retraite, l’employeur est tenu de lui verser une indemnité de départ à la retraite, dite indemnité de fin de carrière, si certaines conditions sont réunies :

    • Le salarié part de sa propre initiative,
    • Il a atteint l’âge requis pour liquider sa retraite,
    • Il justifie d’une ancienneté minimale lui ouvrant droit à cette indemnité.

    Ce que prévoit la loi : 

    À défaut de stipulations conventionnelles plus favorables, le Code du travail prévoit une indemnité minimale fixée comme suit :

    • 1/2 mois de salaire après 10 ans d’ancienneté,
    • 1 mois de salaire après 15 ans,
    • 1,5 mois après 20 ans,
    • 2 mois après 30 ans.

    Mais en pratique, les stipulations conventionnelles sont souvent plus favorables, ce qui vient renchérir le coût du départ. 

    Exemple 1 : départ à la retraite dans la CCN des bureaux d’études techniques (BET)

    Prenons le cas d’un cadre dans une entreprise relevant de la convention collective des bureaux d’études techniques (BET), secteur du Conseil et du Numérique, avec 30 ans d’ancienneté et un salaire brut mensuel moyen de 4 000 euros au moment de son départ.

    L’article 4.8 (Indemnité de départ et de mise à la retraite) prévoit que le montant de l’indemnité de départ à la retraite est fixé en fonction de l’ancienneté acquise à la date du départ à la retraite. 

    Elle se calcule de la manière suivante : 

    • 1 mois de salaire après 5 ans d’ancienneté révolus
    • ⅕ de mois de salaire par année d’ancienneté supplémentaire à compter de la 6ème année d’ancienneté

    Dans notre exemple, cela fait donc 6 mois de salaire, soit 24 000 euros brut. Cependant, ces indemnités, dans le cadre d’un départ volontaire à la retraite (à l’initiative du salarié) sont assujetties à contributions sociales. Si l’on prend un taux de contributions patronales d’environ 40 %, cela nous amène à un coût global de 33 600 euros.

    Exemple 2 : départ en retraite dans la CCN de la Métallurgie

    Prenons le cas d’un agent de maîtrise qui est employé, au moment de son départ en retraite, depuis 21 ans au sein de la même entreprise relevant de la CCN Métallurgie. Son salaire moyen atteint 3 500 euros brut par mois.

    En application de l’article 77.3 de la CCN de la Métallurgie, ce dernier aura droit à 3 mois de salaire, soit 10 500 euros brut. En ajoutant les contributions patronales avec un taux de contribution de 40 %, on arrive à 14 700 euros.

    Dans les 2 cas, le coût pour l’entreprise est loin d’être neutre. Aussi, pour ne pas pénaliser de manière excessive sa trésorerie, le chef d’entreprise a tout intérêt à anticiper le versement de telles indemnités.

Anticiper le coût des IFC : comment et pourquoi mettre en place une stratégie de provision ?

  • La provision n’est autre que la prise en considération des obligations légales ou conventionnelles de l’entreprise relatives au paiement d’une indemnité de départ en retraite. Bien évidemment, la réalisation d’un tel évènement est, par nature, incertaine. Les salariés pourront tout à fait quitter l’entreprise avant leur départ en retraite, en démissionnant, ce qui n'occasionnera alors aucun coût pour l’entreprise. Cependant, la réalité peut être toute autre avec :

    • des départs en retraite qui se cumulent
    • des indemnités parfois très élevées pour un seul salarié
    • un passif social lourd qui pèse sur la trésorerie de l’entreprise et qui compromet les projets de développement ou de transmission de l’entreprise

    Autant ne pas subir de telles éventualités. Regardons donc les outils disponibles pour anticiper ce type de situation.

    La provision comptable interne 

    La provision interne consiste à comptabiliser chaque année une charge estimative correspondant aux droits IFC acquis par les salariés. C’est la méthode préférentielle recommandée par l’Autorité des normes comptables pour une bonne information financière.

    En pratique, l’entreprise enregistre une provision au passif du bilan en contrepartie d’une charge d’exploitation chaque année. Ainsi, au gré des années, le bilan reflète la dette sociale accumulée envers les salariés. Puis, le jour où un salarié part à la retraite, l’entreprise utilise cette provision pour payer l’indemnité, ce qui évite d’impacter lourdement le résultat de l’année du départ, l’impact ayant été lissé sur les exercices précédents.

    Mais cette pratique connaît quelques limites : malgré son intérêt comptable certain, la provision interne n’est pas déductible fiscalement du résultat imposable.

    Autrement dit, les dotations annuelles à la provision sont réintégrées pour le calcul de l’impôt sur les sociétés et n’apportent donc aucun avantage fiscal immédiat. Ce traitement fiscal défavorable décourage d’ailleurs de nombreuses entreprises de provisionner.

    Et cela se comprend parfaitement car, dans un tel cas, aucun fonds n’est réellement mis de côté de manière sécurisée. La trésorerie n’est pas alimentée en vue des IFC futures, si bien que l’entreprise devra malgré tout puiser dans sa trésorerie pour payer l’indemnité le moment venu.

    Ainsi, en cas de difficultés financières ou de départs multiples, une provision purement comptable n’empêche pas le risque de tension de trésorerie. La provision interne améliore donc la lisibilité comptable et anticipe en théorie le coût dans le résultat, mais elle ne sécurise pas le financement et n’apporte pas d’économie d’impôt.

    Pour parer à cette problématique, il peut être pertinent de se tourner vers une externalisation de cette provision via un contrat d’assurance dédié.

    Le contrat IFC externalisé auprès d’un assureur

    Le contrat d’indemnités de fin de carrière externalisé est un dispositif qui permet à vos clients d’anticiper et de financer le versement des IFC en constituant, à l’extérieur de l’entreprise, un fonds dédié.

    Concrètement, le chef d’entreprise souscrit un contrat auprès d’un organisme assureur et y verse des cotisations selon un calendrier libre (versements annuels, ponctuels, etc.).

    Ces cotisations alimentent un fonds qui sera utilisé pour payer les indemnités de retraite dues aux salariés le moment venu. Juridiquement, le contrat est souscrit au nom de l’entreprise et exclusivement dédié au règlement des IFC des salariés.

    Du point de vue de l’entreprise, ce mécanisme revient à préfinancer une charge future de manière échelonnée et sécurisée. L’assureur prend en charge la gestion financière des sommes versées : elles peuvent être placées sur des supports sans risque (fonds en euros) ou plus dynamiques (unités de compte), en accord avec la stratégie choisie, pour essayer de générer des intérêts.

    Ce mécanisme revêt de nombreux avantages : 

    Avantage fiscal immédiat :

    Les cotisations versées sur un contrat IFC sont déductibles du bénéfice imposable de l’entreprise, ce qui permet une économie d’impôt chaque année où un versement est effectué. Par exemple, une cotisation de 500 € versée sur le contrat peut réduire l’IS d’environ 125 € (à un taux d’IS de 25%), ce qui réduit d’autant le coût net pour l’entreprise.

    Lissage des charges et gestion de trésorerie : 

    En externalisant, le chef d’entreprise peut échelonner dans le temps le financement de ses engagements de fin de carrière. Il évite ainsi les chocs de trésorerie liés à des départs non provisionnés qui tomberaient la même année. Par ailleurs, les contrats IFC offrent une grande souplesse en laissant l’entreprise libre d’adapter le montant et le calendrier de ses versements en fonction de sa capacité financière. Elle peut cotiser davantage lors des “bonnes” années et réduire voire suspendre les versements les années plus difficiles. Un vrai plus pour la gestion de sa trésorerie.

    Amélioration de la valorisation de l’entreprise :

    Contrairement à un engagement de retraite non financé, un passif social couvert par un contrat d’assurance a moins de chance d’effrayer les investisseurs ou les acquéreurs potentiels. En effet, externaliser les IFC améliore la lisibilité et la solidité financière de l’entreprise, car le passif est compensé par un actif dédié en face. Les comptes présentent ainsi une image plus fidèle et plus sereine de la situation financière.

    En cas de transmission ou de cession de l’entreprise, le fait d’avoir anticipé et financé ces indemnités constitue un véritable “plus” lors des négociations car le repreneur n’a pas à s’inquiéter d’une dette cachée envers les salariés, ce qui peut faciliter la vente et éviter une décote du prix de cession.

Illustration pratique : que gagne une entreprise avec un contrat IFC ?

  • Afin de mieux appréhender l’intérêt pratique du contrat IFC, comparons ce que cela donne en reprenant le cas de notre agent de maîtrise, sous Convention Collective Nationale de la Métallurgie.


    Hypothèse n°1 – Aucun contrat IFC n’a été prévu (et aucune provision comptable) 

    Le moment du départ en retraite du salarié arrive et l’entreprise doit alors s’acquitter d’une indemnité de 10 500 €, dont le coût entreprise s’élève à 14 700 € si l’on intègre les contributions patronales. Ce montant s’ajoute aux charges de l’exercice en cours, venant diminuer d’autant le résultat de l’année. Si l’entreprise avait un bénéfice modeste, celui-ci peut être fortement amputé voire devenir un déficit à cause de cette dépense soudaine. 

    Par exemple, un résultat avant impôts de 60 000 € tomberait à 45 300 € après versement de l’IFC, ce qui réduit aussi l’impôt à payer cette année-là (de 3 675 euros avec un IS à 25 %) certes mais fait baisser le résultat de  24 % !

    Outre l’effet sur le résultat, c’est un décaissement de trésorerie conséquent qui pourrait mettre à mal l’entreprise.

    Hypothèse n°2 – Anticipation avec un contrat IFC externalisé sur 20 ans

    L’entreprise a souscrit un contrat d’assurance IFC dès l’embauche du salarié et y a versé régulièrement des cotisations. Supposons qu’elle ait versé environ 600 € par an en moyenne sur ce contrat pendant 20 ans. 

    Ces versements lui ont permis d’économiser de l’impôt chaque année (environ 150 € d’IS économisé par an dans notre hypothèse, soit environ 3 000 € d’économie d’impôt cumulée sur 20 ans). 

    De plus, le fonds géré par l’assureur a pu générer des intérêts, augmentant le capital disponible. Au bout de 20 ans, le contrat a accumulé la somme nécessaire pour payer l’IFC de 14 700 €. 

    Lorsque le salarié part, le coût pour l’entreprise est entièrement financé par le contrat : soit l’assureur verse directement l’indemnité au salarié, soit il rembourse l’entreprise qui la paie, selon le fonctionnement choisi. 

    Le résultat de l’année du départ en retraite n’est pas affecté (ou seulement par un éventuel dernier versement au contrat si un ajustement était nécessaire), et la trésorerie de l’entreprise n’est pas sollicitée au moment du départ puisque les fonds provenaient du contrat externe. 

    En outre, grâce aux économies d’impôt réalisées et aux intérêts générés, le coût net pour l’entreprise est inférieur à ce qu’il aurait été sans externalisation. Dans cet exemple, on peut estimer qu’au lieu de supporter un coût de 11 025 euros (14 700 € moins une déduction fiscale différée de 3 675 euros), l’entreprise a supporté autour de 9 000 € nets en effort de trésorerie réparti sur 20 ans (grâce à l’avantage fiscal et aux gains du contrat, estimé, dans cet exemple, autour de 2,5% d’intérêts net d’impôt et de frais). 

    L’externalisation a donc “adouci” l’impact financier de l’IFC, aussi bien en termes de trésorerie que de charge globale sur la durée.

    NB : nous avons pris le partie de couvrir l’intégralité du coût entreprise dans notre exemple, ce qui n’est pas nécessairement le cas de l’ensemble des contrats IFC. En effet, certains proposent uniquement de couvrir l’indemnité versée aux salariés et non les contributions patronales afférentes.

    Nous pouvons résumer le sujet à travers l’infographie que vous trouverez ci-dessous :

Conclusion :

  • Au-delà de l’aspect purement financier, la mise en place d’un contrat IFC externalisé s’inscrit dans une démarche de gestion prévoyante et stratégique de l’entreprise. Pour un dirigeant, les principaux intérêts d’un tel dispositif peuvent être résumés ainsi :

    Préservation de la capacité de développement : En évitant qu’une grosse charge de départ en retraite ne vienne obérer la trésorerie ou le résultat d’une année, l’entreprise protège sa capacité d’investissement et de développement.

    Sécurité en périodes difficiles : Durant les périodes de ralentissement économique ou de baisse d’activité, une entreprise qui a externalisé ses IFC est plus résiliente. Elle n’a pas à puiser dans des ressources déjà amoindries pour honorer des obligations sociales imprévues.

    Valorisation de l’entreprise et facilitation de la cession : Pour un dirigeant envisageant tôt ou tard de transmettre ou vendre sa société, externaliser les IFC est un choix judicieux. C’est un signal de bonne gestion, qui améliore la valeur patrimoniale de l’entreprise aux yeux d’un acquéreur puisque l’acheteur n’a pas à prévoir dans son plan de reprise le financement futur des IFC, ce qui rend la société plus attractive et peut éviter une négociation à la baisse du prix de vente.

    Alors, si vous souhaitez proposer une externalisation des IFC à vos clients dirigeants d’entreprise, faites appel à nos experts Harmonie Mutuelle pour bâtir une solution adaptée.

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